jeudi 10 mai 2007

La réponse de N. Sarkozy au courrier de l'AFDA

N. Sarkozy a répondu au courrier adressé par B. Deslandes, président de l'AFDA, aux candidats à  l'élection présidentielle. Voici le texte intégral de sa réponse.



Paris, le 2 mai 2007.


Monsieur le Président,


Vous m'avez interrogé sur la place qui doit être reconnue à l'enseignement de la langue arabe en France. C'est avec la plus grande attention que j'ai pris connaissance de vos préoccupations, et vous remercie de m'en avoir fait part.
La langue française est l'âme de la France, sa culture, sa pensée et plus encore sa liberté. La diversité linguistique a toujours été un facteur de liberté de pensée et la condition du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Je ne crois pas à la langue unique, y compris au prétexte de son efficacité. Chaque lange a des subtilités d'interprétation. La politique de la langue unique est, en réalité, un leurre qui masque la volonté de domination de la pensée unique.

J'ai bien conscience que le patrimoine linguistique de la France, ce n'est pas seulement le Français. C'est aussi l'extraordinaire richesse de ses langues régionales et des langues parlées de tous ceux qui sont issus de l'immigration. L'ignorer, se résigner à leur disparition, constituerait un immense appauvrissement, y compris pour la langue française. Je souhaite que leur enseignement soit correctement pris en charge par l'éducation nationale. Je souhaite que l'on soutienne leur pratique et leur diffusion.

Pour autant, il n'est pas question de confronter le Français aux autres langues régionales. Nous avons le devoir de veiller à l'unité française que nous avons mis si longtemps à construire et qui reste le bien le plus précieux mais aussi le plus fragile que nous ayons à léguer à nos enfants.

Si je suis élu, je ne serai pas favorable à la charte européenne des langues régionales. Je ne conteste pas les langues régionales. Au contraire, je veux les soutenir et les développer. Mais je crains que l'adoption de cette charte n'ait des conséquences sur le Pacte national.

Force est de constater que la question des minorités en France n'est pas celle des minorités en Europe. Et je crains que le juge européen chargé d'appliquer cette charte, en considérant des expériences historiques du problème des minorités différentes des nôtres, ne conclue qu'une langue régionale peut être considérée comme langue de la République au même titre que le Français. Au-delà de la lettre des textes, il y a la dynamique des interprétations et des jurisprudences qui peut aller très loin. La question des langues et de la place du Français est consubstantielle à notre pacte national.

L'enseignement de l'arabe occupe une place particulière en France compte tenu des attaches qui nous lient avec les pays du Maghreb en particulier et de la tradition des études orientalistes. Nous venons de célébrer le centenaire de l'agrégation d'arabe il y a quelques mois. C'est un enseignement ouvert à tous, qui contribue au dialogue entre les cultures, au respect et à la compréhension mutuelle.

Il touche de plus en plus de jeunes qui n'ont pas de lien familial avec la culture arabe, mais qui sont séduits par la richesse de cette langue et de la culture à laquelle elle donne accès. De nombreuses universités disposent de départements d'études arabes, mais dans le secondaire les effectifs stagnent.

La rénovation de cet enseignement s'inscrit désormais dans le cadre européen commun de référence, en favorisant les capacités de compréhension et d'expression orale des élèves. Son enseignement permettra de s'ouvrir plus facilement aux civilisations dont elles sont le vecteur.

L'arabe doit pouvoir être offert à tous car il répond à un objectif de diversification linguistique et constitue un facteur de richesse culturelle. Sa maîtrise accroît également les perspectives d'insertion professionnelle. Pour toutes ces raisons je souhaite que son enseignement soit encouragé au sein de l'Éducation nationale.

En espérant que ces précisions répondent à vos attentes légitimes et restant à votre écoute, je vous prie de croire, Monsieur le Président, en l'assurance de mes sentiments les meilleurs.



Nicolas SARKOZY, Candidat à l'élection présidentielle